Les agents Mawlud Faal et Ousman Jallow, respectivement de la Police Gambienne et des Services de Renseignement de l’Etat, ont donné leurs versions des faits hier lors de leurs témoignages devant la Commission Vérité, Réconciliation et Réparations sur l’arrestation et la détention de 52 migrants ouest-africains qui étaient entrés clandestinement dans le pays le 22 Juillet 2005.
Mr Faal a été le premier à témoigner. Il a expliqué qu’il avait été contacté par Babucar Bah et informé par ce dernier qu’ils avaient reçu des informations concernant un groupe de personnes à la recherche d’un bateau de transport. Faal a ajouté qu’ils étaient soupçonnés d’être des trafiquants de drogue.
« Nous leur avons fait croire que nous avions des bateaux de transport. Lorsque nous sommes arrivés au lieu de rendez-vous, il y a eu un léger murmure et nous avons vu des gens sortir de divers endroits de la plantation de mangroves. Lorsque je les ai aperçus, je me suis rendu compte que ces gens n’étaient pas des trafiquants de drogue, mais plutôt des migrants clandestins car il n’y avait rien en leur possession indiquant qu’ils étaient des narcotrafiquants. »
Il a déclaré à la Commission que son officier supérieur a appelé les autorités et, après un petit moment, une équipe de renforts est arrivée à bord de deux ou trois bateaux. Il a déclaré que les captifs ont été conduits au Commissariat de Barra. Les agents de l’immigration devaient recueillir leurs données personnelles.
Faal a affirmé qu’il a quitté les lieux en ce moment-là pour retourner dans ses quartiers. Le lendemain matin, il s’est rendu compte que les services de l’immigration avaient escorté les migrants à Banjul, et ce, en vue de poursuivre leurs investigations.
Ousman Jallow, un agent des services de renseignement a également expliqué qu’il était l’officier en charge des investigations à l’Agence Nationale de Renseignement au moment des faits. Il a également témoigné qu’il avait été contacté par son supérieur, qui était selon lui le Directeur des Operations Ngorr Secka, qui l’a informé de la présence de mercenaires ou de rebelles dans le pays.
« Il m’a dit de me joindre aux agents de la Marine qui étaient déjà dans un bateau et armés. J’étais l’officier en charge car j’étais le plus gradé. Suite à mon arrivée à Barra, je me suis rendu au commissariat de police afin de parler au commandant et lui expliquer le but de ma mission. J’ai demandé à m’entretenir avec les détenus. Il m’a montré le chemin des cellules. J’ai demandé aux détenus l’origine de leur départ et l’identité de leur leader. Ils ont identifié un Nigérian qui m’a révélé qu’ils viennent tous d’un camp de migrants au Sénégal. Ils avaient tous l’intention de se rendre en Europe mais ils ont été transportés dans le pays par un intermédiaire Sénégalais qui les a abandonnés aux mains d’un intermédiaire Gambien. »
Le témoin a déclaré que le numéro de l’agent lui a été transmis. Lorsqu’il a appelé le numéro, il s’est rendu compte que l’intermédiaire en question était un certain Lamin Tunkara, connu pour sa participation active dans le transport de migrants clandestins.
Il a poursuivi pour dire qu’il a informé son supérieur à ce moment-là que les détenus n’étaient pas des mercenaires ou des rebelles, mais plutôt des migrants clandestins qui voulaient se rendre en Europe. Il a alors signé le procès-verbal à la station de Barra avant d’escorter les 50 migrants à Banjul.
« J’ai escorte les détenus au quartier général de la Marine. L’ancien Inspecteur General Ousman Sonko et Assan Sarr se sont rendus sur les lieux en compagnie du Chef d’Etat- Major. Kawsu Camara alias le Bombardier avait l’intention de garder les prisonniers en détention. Le Chef d’Etat-major leur a demandé les raisons de leur présence dans le pays. Les détenus ont dit qu’ils avaient l’intention de se rendre en Europe. Je peux vous affirmer que le Chef d’Etat-major était parfaitement au courant que les détenus étaient des migrants. »
Le témoin a ajouté que les détenus ont été conduits et gardés dans la cour de Baba Jobe à Kotu et dans d’autres commissariats. Selon lui, des paramilitaires étaient présents dans la maison le jour suivant mais les détenus ne s’y trouvaient plus. Il a dit à la Commission que c’est à ce stade que les détenus ont disparu.
Mr Jallow a déclaré qu’il a décidé à ce moment-là de mettre un terme aux investigations. Il a confirmé que des responsables de l’ONU, de la CEDEAO, et de l’UA ont séjourné dans le pays à plusieurs occasions afin de mener des investigations sur le sort des migrants. Il a déclaré avoir entendu dire que le gouvernement de la Gambie avait mis à mort 44 Ghanéens.